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Se repérer dans les modèles de l'évaluation : histoire, méthodes, outils

TitreSe repérer dans les modèles de l'évaluation : histoire, méthodes, outils
Publication TypeJournal Article
Année2012
AuthorsVial, M
Pagination1 vol.
ISBN Number978-2-8041-6894-0<br/>9782804168940<br/>0777-5245
Mots-clésÉducation, Évaluation, Régulation
URLhttp://www.michelvial.com/
Full Text

Le contrôle stabilise : il est nécessaire, l’accompagnement dynamise : il est essentiel (Vial, M. 2012, p.285)

 

Situez-vous

  • Dans cet ouvrage, le dernier chapitre développe un nouveau modèle de l’évaluation : évaluation située ou en acte. Pendant notre formation nous avons souvent entendu dire que celui-ci n’était qu’une théorie sans avoir été prouvé scientifiquement. Afin de clarifier cela et ayant exploré ce concept avec l’auteur avant son décès, nous nous permettons de dire que ce modèle de l’évaluation située ou en acte n’est ni nouveau et n’est ni seulement concept. C’est ce que vous vivez au quotidien à chaque instant en lisant ces lignes.
    • Ce modèle n’est ni nouveau puisque c’est le processus princeps qui permet au fœtus, au petit enfant puis à l’adulte de gérer à chaque instant ses actes. (cf. Évaluation n°1 : Processus)
       
    • Ce modèle n’est ni seulement un concept puisque ceux-là mêmes qui ont évalué en situation dans le contexte de la présentation de notre mémoire sur ce thème de “l’évaluation située entre théorie et opérationnalité, ont utilisé l'évaluation située d’une part pour nous noter dans une évaluation du contrôle par la mesure et d’autre part ils ont pu vérifier la conformité du produit réalisé, sa méthodologie dans une évaluation du contrôle par la gestion.
  • Ainsi, nous pouvons affirmer et conclure que l'évaluation du contrôle (pulsion de mort d'un plus de la même chose) à de très beaux jours devant lui, puisque même certains membres du jury, comme éminents universitaires, restent toujours dubitatifs concernant ce modèle de l’évaluation en acte ou située (pulsion de vie d'un autre chose autrement) et les mots processus qu'il porte et représente “évaluer - réguler” (verbes d’action).

Démêlons des confusions

  • Dans l’évaluation et la régulation il y a deux façons de les aborder. Soit suivant la finalité régulative (régularisatrice, formative, formatrice ou régulatrice), soit suivant son usage dans la vie pragmatique. Comme le formule Berger ci-dessous, il y a derrière ces mots deux pratiques différentes :
    • "Pour évaluer des pratiques, des institutions, des systèmes, la seule manière de répondre aux problèmes évoqués c’est de considérer que le terme évaluation recouvre, en réalité, deux pratiques intellectuelles qu’il est possible de distinguer rigoureusement, de distinguer et non d’opposer, car il peut y avoir complémentarité et même mélange au niveau des pratiques : ce sont les pratiques du contrôle et les pratiques de l’évaluation (en donnant maintenant à ce terme un sens spécifique)." (Berger, M. 1986, pp 75-87)
  • L’évaluation suivant la finalité
    • Évaluation du contrôle et de régularisation
      • Par la mesure d’un écart à un étalon idéalisé comme "vrai", le réel est prescrit
      • Par la gestion d’un écart à un contrat implicite ou explicite, le réel est prescrit
    • Évaluation d’élaboration de sens et de régulation
      • Par notre façon de penser : problématique, dialectique et herméneutique, le réel est élaboré
  • Suivant la logique intellectuelle ou pragmatique
    • Évaluation comme procédure (substantif)
      • Des dispositifs de contrôle d’un écart à une norme ou un contrat, nommé évaluation de la mesure et de la gestion
    • Évaluation comme processus (verbe d’action)
      • Des phénomènes d’orientation par auto-évaluation et auto-régulation en situation dans un contexte, nommé évaluation située ou en acte par Michel Vial.
  • Illustrations cliniques
    • Pour nuancer cela pour l’évaluation du contrôle par la mesure si nous attendons une réponse précise comme combien font 1+1, si le résultat comme produit n’est pas 2 mais 1 quand j’achète et 3 quand je revends dû au contexte et à la situation, alors la sanction tombe sous forme de faute et de note. Avec l’évaluation de la mesure par la gestion des contrats préféré par la justice, la morale, les religions… si l’un des membres d’un couple marié est volage, alors le contrat reliant ce couple est la référence de la mesure de la faute. Dans ces deux cas de l’évaluation du contrôle par la mesure et la gestion, que la finalité de régulation soit régularisatrice formative ou formatrice ce qui compte c’est le retour aux référents institués comme vrais (étalon) ou d'engagements mutuels (contrat). Cela est une comparaison comptable. Continuons par l’évaluation d’élaboration de sens, ce qui compte ici ce n’est plus un retour à ce qui était prévu mais une élaboration d’un autre chose autrement et pour ce faire le moyen utilisé est la pensée comme processus où le substantif “évaluation” reprend sa place originaire de verbe d’action “évaluer”. L’exemple du contexte du médecin en salle d’opération qui improvise à chaque instant opératoire illustre ce processus d’auto-évaluation et d’auto-régulation en acte et en situation. Sans cela, seul les procédures et protocoles règnent en maître et notre médecin acteur deviendrait un simple agent de l’institué ou uniquement 1+1 = 2 quelque soit la situation et le contexte.
       
    • Ainsi la question clé serait comment penser autrement (cf.Michel Foucault) en quittant l’évaluation de procédures de contrôle par la mesure ou par la gestion et sa régularisation ? L’auteur propose de penser autrement en trois phases :
      • Problématique à questionner et non problème à résoudre
        • Référentialisation de ce qui existe, se dit, se pratique… (ce qui vaut, les valeurs > critères)
      • Dialectique de la pensée dynamique et non rhétorique d’une pensée logique,
        • Articulation de contraires, sans déni de l’un des termes comme ici (contrôle/évaluation)
      • Herméneutique interprétative et non psittacisme d'un plus de la même chose.
        • Choisir pour pouvoir s’orienter et avancer (processus d'apprentissage)
    • "L'accord entre ces deux modèles peut se faire, chemin faisant, dans l’évaluation comme problématisation du sens, dans la tension entre le sens donné, établi , comme réponse à mesurer, à vérifier avec des gabarits préétablis, et le sens élaboré, fondé ou trouvé ou à questionner, à interpréter, à chercher. (…) Tant il est devenu important de «changer notre façon de penser pour penser la complexité.

      L'évaluation est ici considérée comme rapports de sens, ruses de sens, comme gestion dans l'instant d'une rationalité limitée par des interrelations vivantes singulières, dans des dispositifs vécus, portés par des projets, dans la complexité des pratiques sociales.

      Donc, évaluer, c'est avoir et (faire vivre) des problématiques du sens qui puissent articuler les visées contraires du bilan et de l'accompagnement, de la vérification et de l'interprétation. Articuler, c'est-à-dire non seulement alterner les rôles aux significations opposées mais aussi passer d'une logique de fonctionnement à l'autre, faire tourner ensemble des forces opposées dans des approches du sens complémentaires, dans une intelligence de la Métis, brassant les produits, les procédures et les processus. (Bonniol, J.-J., & Vial, M. 1997 p.355)

       

Bilan sur l’évaluation et la régulation

  • L’évaluation en acte ou évaluation située de l'auteur à cette particularité de quitter les procédures d’évaluations du contrôle de la mesure et de la gestion au bénéfice du processus d’auto-évaluation et d’auto-régulation en situation contextualisé. L’agent devient acteur et voire auteur de sa propre dynamique… d'apprentissage sans faire le déni de l'évaluation du contrôle comme institution normative mais tout en tenant compte celle-ci. C'est la capacité de l'acteur a articuler (Contrôle/Évaluation) pour Ardoino & Berger ou (institué/instituant) pour Castoriadis entre les intérêts (Social/Sujet) de la psychosociologie des (Surmoi/Moi) pour les psy. C'est l'articulation du lien comme éthique de la relation entre éthique du sujet, ses valeurs propres, et l'éthique du social, les valeurs du groupe d'appartenance.

 

Citations

Le sens n'émerge pas de l'action, car il n'y est pas immergé, il est en action : tressé avec l'action, il est pris dans l'agir, il est dans le travail d'intelligibilité, dans l'évaluation permanente, une dimension de l'agir (…) Dans l'accompagnement, le sens est mis en liaisons (Vial, M. 2012, p.295)

La régulation systémiste appliquée aux ressources humaines, élargit le cadre de référence des acteurs par la notion de projet : si on peut se permettre de diverger, c’est parce que l’écart n’est pas obligatoirement une erreur, et ce n’est pas n’importe quoi non plus.  Cette divergence qu'on invente est pertinente au projet dans lequel sont les acteurs, l’élève et l’enseignant. Le projet est ici un élément de cohésion du système. On est passé d’une régulation au service de l'intégration du programme pour la réussite obligatoire des produits fabriqués à une autre régulation, cette fois au service du projet de réussite sociale des acteurs du système.

Par l'auteur

    Evaluation

    1. Pratique greffée sur une autre pratique ; s’en distingue par un travail des critères. Travail des valeurs dans l’activité d’un sujet. Est une dimension de l’agir. Traduit le désir de rendre intelligible ce que l’on fait.
    2. Comporte deux logiques contradictoires : (Voir logiques de l’évaluation).
    3. Vouloir saisir la réalité par des procédures rationnelles de contrôle ou l’approcher par une vision globale qui cherche à comprendre, sont des attitudes révélatrices d’un système explicatif du monde qui dépendent des choix profonds du sujet (voir paradigmes). La formation à l’évaluation permet de passer de ces préférences à une mise en dialectique pour assumer les problématiques de l’évaluation.
    4. Comme pratique d’intervention se décline en plusieurs thématiques, correspondant à des processus dans l’organisation dont l'importance varie suivant le modèle d'évaluation convoqué : cognitive (production de connaissances sur l'objet d'évaluation), instrumentale (visant à produire des stratégies d'amélioration ou du changement), d’orientation (visant à proposer une politique pour l’organisation) etc.… Dans tous les cas, dans les métiers de l’humain, institue une relation éducative.
    5. N’est pas le domaine de la véridiction, (de la profération de la vérité) ; est avant tout travail des valeurs en situation. « Quand le langage est investis de valeur, le mensonge, la polysémie, l’à-peu-près sont à l’œuvre mais comme autant d’épreuves pour parvenir à la vérité (jamais atteignable mais toujours recherchée) et à l’établissement de communications dans lesquelles les sujets se confrontent à leurs limites, à leur mort, comme à leur possibilité de création ».

    Logiques d’évaluation

    1. La logique de contrôle permet d’assurer la fonction sociale de bilan, d’arrêt sur image pour faire le point et stabiliser en vérifiant la conformité.
    2. L’autre logique de l’évaluation est au service de la promotion des potentiels, des possibles, qui assure la fonction sociale de promotion des dynamiques (l’accompagnement). Tout ce qui reste quand on ne fait pas du contrôle.
    3. Le travail de tout intervenant consiste, en fonction de son projet (Voir projet d’évaluation) et non pas seulement de ses préférences, soit à choisir l’une des logiques, soit à tenter de les articuler dans son intervention.

    Définition de l’évaluation située

    • L’évaluation située met la personne, le sujet au premier plan.
    • Evaluer pour l’intelligibilité dans l’évaluation située c’est faire l’examen critique de l’activité, questionner les projets, travailler à l’appropriation des attitudes professionnelles pour l’émancipation, la professionnalisation des sujets au travail.
    • Evaluer, c’est étudier de la variabilité des critères en acte que se donne le professionnel, selon les situations. La valeur est plurielle et en débat dans l’activité.
    • L’éthique est indissociable de la pratique de l’évaluation située. La déontologie règle la situation (une charte, un pacte) c’est la morale du métier. L’éthique, elle, apparaît en situation sous forme d’un questionnement. La réponse ne peut être que collective. L’éthique de la relation n’est pas un ensemble de principes a priori.

    Définition d’un dispositif d’évaluation située

    • "Dispositif de l’évaluation pensée comme problématisation des situations dans l’herméneutique et la dialectique : mise à disposition des acteurs de répertoires de critères donnés sous la forme souvent interrogative qui ne dicte jamais la solution ou la bonne pratique. Doit permettre la prise de conscience des zones à conforter et provoquer un questionnement pour une formation et un changement des pratiques. Focalisation sur les attitudes et les compétences des acteurs pour accélérer le changement. Projet d’articulation chaque fois que possible des deux logiques de l’évaluation, le pilotage et l’accompagnement. Mise en débat et remise en question des visées et des ancrages épistémologiques : mise en travail du processus de référenciation ; inventions de régulations et pas seulement de corrections ; problématisations et pas seulement problémation, développement du processus d’orientation” (Vial 2012 p.285)

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