E1 - Diagnostic ( Univoque > Certitude / Équivoque > Incertitude )
- Dans cet article, nous avons placé en tension dialogique (déf. ci-dessous) : d’un côté le social avec ses dispositifs d’évaluation du contrôle (mesure + gestion); de l’autre côté le sujet et son dispositif d’évaluation située "performative". Notre hypothèse était la suivante entre (Social/Sujet) : l’un comme cause influencerait et impacterait l’autre comme effets et inversement… à la seule condition que l'évaluation située "performative" fonctionne chez les acteurs et soit surtout autorisée et opérationnalisée par le social. Nous avons vu que ce concept d’une causalité non plus linéaire mais circulaire des boucles récursives est développé dans la pensée complexe : "les produits et les effets sont eux-mêmes producteurs et causateurs de ce qui les produit" (Morin E. 2013). L’un va créer l’autre et vis versa… cette articulation est-elle impensable, est-ce ”scientifiquement hérétique“ ? Ce qui serait le cas dans les sciences dites de la nature, mais aucunement dans les sciences humaines et sociales. Qui en parle ?
- Gaston Mialaret, ayant la quadruple formation mathématique - psychologie - pédagogie et philosophie, dans son ouvrage de 2015 sur l'esprit scientifique et les sciences de l'éducation, montre ce phénomène de "boucles causales". La causalité linéaire mécaniciste de Descartes provocateur d'effets ne peut s'appliquer aux relations humaines et ainsi au diagnostic univoque. En pointant le travail d'Edgar Morin reprenant celui de Norbert Wiener, Gaston Mialaret écrit que l'idée de rétroaction "rompt avec le principe de causalité linéaire en introduisant celui de boucle causale" (p.18) où cause et effet sont interdépendants l'un de l'autre : "La cause n'est pas indépendante des effets qu'elle provoque" (p.16). Le diagnostic univoque n'est plus valide dans les relations humaines, il laisse sa place au diagnostic équivoque. Ce dernier prend en compte l'environnement, le contexte et l'histoire de l'accompagné, apprenant, patient ou client (Mialaret, G. 2015).
- Entre causalité d'un temps linéaire et causalité d'un temps cyclique avec ses boucles de rétroactions, notre rapport au temps en serait la clé. Ces deux façons de penser et de se représenter notre réalité sont exprimées dans nos articles sur les bases du changement et sur le changement, le temps et la permanence : "le temps où cela se passe, n'est pas le temps où cela signifie" (André Green). Ce conflit des temps et des permanences met en scène notre façon de penser notre réalité avec d'un côté l'approche statique et incrémentale (Parménidienne & Aristotélicienne) et de l'autre l'approche cinétique et itérative (Héraclitéenne & Galiléenne).
- En simplifier et pragmatique, cela voudrait dire que si l'un change l'autre va suivre, l'un dépend de l'autre et vis versa. Dans le couple (Sujet/Social), changer le contexte d'écoute et d'échange et vous modifier les attitudes des acteurs qui le composent. La communication non violente ou CNV, "la maison verte" de Françoise Dolto, le travail de Donald Winnicott sur les processus, les Groupes d'Analyse de Pratiques (GAP) et les néo-organisations citées à la page précédente mettent tous en scène cette récursivité des boucles causales sans forcément le savoir. Ce qui va mal ce ne serait pas les objet-sujets et leurs psychopathologies fonctionnelles ou les objet-sociaux comme structures Surmoïques (tous deux dans des relations d'objet), ce qui ne va pas ce serait avant tout la qualité des relations et des postures de tous (relation de milieu de la théorie des champs). Entre un diagnostic univoque à caractéristiques affirmatives de la certitude (causalité linéaire - pensée rhétorique - évaluation rétrospective) et un diagnostic équivoque à caractéristiques estimatives d'une probabilité (causalité des boucles récursives - pensée dialectique - évaluation prospective), une articulation est à trouver. Cela nous rappelle que les tragédiens avaient mis en scène ce même paradoxe il y a plus de 2.000 ans de cela.
- Entre causalité d'un temps linéaire et causalité d'un temps cyclique avec ses boucles de rétroactions, notre rapport au temps en serait la clé. Ces deux façons de penser et de se représenter notre réalité sont exprimées dans nos articles sur les bases du changement et sur le changement, le temps et la permanence : "le temps où cela se passe, n'est pas le temps où cela signifie" (André Green). Ce conflit des temps et des permanences met en scène notre façon de penser notre réalité avec d'un côté l'approche statique et incrémentale (Parménidienne & Aristotélicienne) et de l'autre l'approche cinétique et itérative (Héraclitéenne & Galiléenne).
- Gaston Mialaret, ayant la quadruple formation mathématique - psychologie - pédagogie et philosophie, dans son ouvrage de 2015 sur l'esprit scientifique et les sciences de l'éducation, montre ce phénomène de "boucles causales". La causalité linéaire mécaniciste de Descartes provocateur d'effets ne peut s'appliquer aux relations humaines et ainsi au diagnostic univoque. En pointant le travail d'Edgar Morin reprenant celui de Norbert Wiener, Gaston Mialaret écrit que l'idée de rétroaction "rompt avec le principe de causalité linéaire en introduisant celui de boucle causale" (p.18) où cause et effet sont interdépendants l'un de l'autre : "La cause n'est pas indépendante des effets qu'elle provoque" (p.16). Le diagnostic univoque n'est plus valide dans les relations humaines, il laisse sa place au diagnostic équivoque. Ce dernier prend en compte l'environnement, le contexte et l'histoire de l'accompagné, apprenant, patient ou client (Mialaret, G. 2015).
E1 - Ce conflit contemporain serait-il aussi ancien que l'humanité ?
- Certains concepts de la pensée complexe (ci-dessous) trouvent leurs sources d’inspiration dans la théorie quantique contemporaine comme dans la pensée tragique et la tragédie de la Grèce ancienne (Vernant & Vidal-Naquet 1986). Est-ce un hasard, justement lorsque notre monde vit une période de pessimisme ambiant, si l'interprétation de Nietzsche de "la naissance de la tragédie", où "hellénisme et pessimisme" s'opposent, que ressurgissent au XXIe siècle les mêmes idées comme cela a été le cas il y a plus de 2 000 ans au Ve & VIe siècles av. J-C en Grèce ancienne ?
- L'opposition de Nietzsche entre d'un côté l'apollinien (Logos > Raison logique > Objectivité > Certitude ) et de l'autre côté le dionysiaque (Mythos > Intuition > Subjectivité > Incertitude) réapparaît sous différentes formes. Comment allons nous exprimer notre tragédie contemporaine des paradoxes entre le désir des organisations sociales de contrôler et de régulariser et cette nécessité du sujet d'évaluer et de se réguler ? Aujourd'hui, ces paradoxes et les postures concomitantes de guidage et d'accompagnement sont bien plus en désaccord qu'elles ne s'articulent ensemble comme dans une chorégraphie à la Pina Bausch soutenue par le chœur "satyrique" du sacre du printemps de Stravinsky.
- Si l'un prédomine sur l'autre nous sommes dans une pulsion mortifère apathique. Si l'un s'articule avec l'autre nous sommes dans une pulsion de vie dynamique. La question serait : "Comment articuler ces paradoxes ?" La réponse de la Grèce ancienne Ve et VIe av. J-C a été la tragédie. La réponse de Nietzsche fin XIXe siècle fut l'art musical. La réponse de la psychanalyste au début du XXe siècle semble être la sublimation. La réponse du XXIe siècle serait le travail du champ : contexte, postures et pédagogie relationnelle de la psychopédagogie.
- L'opposition de Nietzsche entre d'un côté l'apollinien (Logos > Raison logique > Objectivité > Certitude ) et de l'autre côté le dionysiaque (Mythos > Intuition > Subjectivité > Incertitude) réapparaît sous différentes formes. Comment allons nous exprimer notre tragédie contemporaine des paradoxes entre le désir des organisations sociales de contrôler et de régulariser et cette nécessité du sujet d'évaluer et de se réguler ? Aujourd'hui, ces paradoxes et les postures concomitantes de guidage et d'accompagnement sont bien plus en désaccord qu'elles ne s'articulent ensemble comme dans une chorégraphie à la Pina Bausch soutenue par le chœur "satyrique" du sacre du printemps de Stravinsky.
Psycho Pédagogie Familiale & Sociétale
Maternologie - Parentalité - Enfance - Adolescence - Adulte
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Info + Le mode de pensée complexe (Texte de Michel Vial)
- C'est une méthode vulgarisée par Edgar Morin. Ce sont des principes pour une gymnastique de l’esprit, sachant que le complexe n’est pas le contraire du simple, Le simple est au cœur du complexe. Le défi complexe est de penser le complexe à partir des quatres concepts inter-reliés ci-dessous. L’ordre, le désordre, l’organisation, les inter-relations, c’est « la constellation » de base. L’organisationnel n’existe pas en soi, contrairement à ce que pensent les fonctionnalistes. L'organisation n'est qu'un des éléments de cette galaxie de concepts dans laquelle tous les éléments doivent être conçus en même temps, alors que deux d'entre eux sont contradictoires. Réhabiliter le lien de contradiction. L’ordre est souvent parlé sous l’objectif de « la cohérence », ce qui devient le symptôme d’une obsession quand elle est un leitmotiv. Le désordre est ici réhabilité comme nécessaire, inéluctable, comme un surplus de sens, un débordement utile qui contrebalance le primat de la cohérence : réhabiliter la perte, le gaspillage, le luxe, le trop plein, l’esthétique baroque. L’organisation se lit et comme structure et comme système. Les interrelations sont les connexions, les réseaux les inter-influences. L’organisation n'est qu'un des éléments de la galaxie de concepts dans laquelle tous les éléments doivent être conçus en même temps : de même qu’un système n’existe pas, c’est un outil, l’organisationnel ou le fonctionnel n’existe pas non plus sans les humains qui les portent.
- Les quatre principes directeurs de la pensée complexe
- La dialogie consiste à associer deux éléments en une seule visée, de façon inséparable, complémentaire tout en les concevant aussi comme concurrents et antagonistes. C'est donc un principe qui permet non pas l'association des contraires dans un tout où ils se fondraient mais qui permet l'articulation des contraires ; par exemple, les notions d'ordre et de désordre sont dans un rapport dialogique : on ne peut penser l'un sans penser aussi l'autre.
- La récursivité où ce qui sert l’identification de la cause sert en même temps la production, le résultat : ce qui génère est généré. On dira qu'ordre et désordre sont en récursivité quand on conçoit que les effets que l'un de ces éléments produit, servent en même temps que se produisent ces effets, à produire leur cause. C'est le principe de causalité chronologique qui est abandonné pour le principe de causalité circulaire en synchronie : les conditions d'existence ne précédent pas l'existence, les unes produisent les autres dans un même temps.
- L'hologramme permet de concevoir les rapports entre le tout et la partie : la partie est dans le tout, et le tout (en tant que tout) est dans la partie ; donc le tout est à la fois plus et moins que la partie. Le social est dans l'individu, lequel comporte en plus sa singularité. Le programme total est dans la cellule même si certaines parties de ce programme sont inhibées.
- La boucle : ces trois principes peuvent être appliqués aux mêmes objets et ils doivent être conçus comme bouclés les uns aux autres. Boucles rétroactives, proactives, interactives du système cybernétique mais aussi boucles ouvertes sur l'imprévisible créatif de complexité et sur l'éphémère. Rien n’est déconnecté. Voir bouclage.
- La dialogie consiste à associer deux éléments en une seule visée, de façon inséparable, complémentaire tout en les concevant aussi comme concurrents et antagonistes. C'est donc un principe qui permet non pas l'association des contraires dans un tout où ils se fondraient mais qui permet l'articulation des contraires ; par exemple, les notions d'ordre et de désordre sont dans un rapport dialogique : on ne peut penser l'un sans penser aussi l'autre.
- Conception difficile, vertigineuse. La pensée complexe est exigeante : "C'est difficile, c'est fragile, c'est éphémère, c'est beau. Mais je crois, je crois en quelque chose de fragile, j'y crois de façon fragile, et je dirai même, je crois au fragile, je crois à la beauté éphémère" (Morin 1990). En effet, la pensée complexe exige aussi d'admettre la parole (singulière, du Je qui pense) : “Je ne travaille que les idées qui me travaillent” (Morin 1986). Ce n’est pas une pensée désincarnée. Le complexe, c’est l’acceptation de l’humain. Il se communique comme une interprétation du monde et non pas comme une révélation de la vérité, c’est le moment de se raconter des histoires, d’inventer des fictions, d’émettre du sens (la sémiose).
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Nietzsche, F. (1977). La Naissance de la tragédie ou hellénisme et pessimisme: Paris, Livre de Poche
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Vial M. : http://www.michelvial.com/vocabulaire_RH/Lexique_RE_MV_2014_Web.htm#_Toc192943925
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Morin, E. (1986) Sur la définition de la complexité. Science et pratiques de la complexité. Actes du colloque de Montpellier de 1984, Paris : La documentation française, pp. 79 – 86.
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Morin, E. (1990) Messie, mais non. Arguments pour une méthode, Colloque de Cerisy, Paris : Seuil, p.267.
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