— 5 - Éthique, valeurs et régulateurs

 

Côtés Grecque et Latin

Nous avons présenté la démarche de ces philosophes de la Grèce antique qui ne dissociait pas l’agir du penser en acte comme processus d’évaluation et d’autoévaluation. Être un philosophe impliquait une réflexion sur l’action ou autrement dit les valeurs et vertus (critères) qui conditionnent le choix d’action.

Nous avons vu sommairement que pour ces trois écoles ce qui vaut pour chacune d'elles est différent. L’une postule sa soif de la connaissance, l’autre postule la limitation des besoins, quand la dernière appuie sur notre responsabilité en tant que sujet pensant tout cela pour atteindre le but de l’ataraxie ou paix de l’âme (sagesse). Mais pour ces trois courants de pensées, le même souci étudie ce qui conditionne leurs actions : l’éthique.

Venant du mot grec “ethos” comme “manière de vivre”, l'éthique est une donnée de la philosophie. En Grèce antique, l’éthique est proche de l’idée de vertu ou d’action vertueuse. Ce qui implique un sens moral au sens mœurs du bien, du juste, du nécessaire, etc.. des lois de la cité. Côté Latin, le terme latin “ethicus” est souvent synonyme de morale dans les traductions du concept d'éthique des philosophes grecs antiques. Ainsi, l’éthique est-elle la science de la morale, est-ce cela ? L’éthique s'intéresse aux comportements humains et à leurs conduites. Ainsi posée, l’éthique est-elle un processus d’action ou une morale comme produit créé sous forme de référentiel de critères de valeurs du moment de la cité ?

 

Éthique & Valeurs

L’éthique est ce processus de questionnement ou d’évaluation chez le sujet sur l’agir avec une pensée qui soupèse le pour et le contre, une pensée dynamique et dialectique. Lorsque nous agissons, automatiquement nous nous référons consciemment ou inconsciemment à ce qui vaut ou ce qui serait préférable.

Imaginez que vous roulez derrière une voiture escargot. Cette route a une bande blanche au centre d’interdiction de doubler. Votre questionnement éthique vous propose deux possibilités : soit vous vous conformer et vous vous référer au Code de la route (valeur externe sociale) ou bien soit si vous êtes pressé, vous pouvez décider de dépasser le véhicule escargot et ainsi d'enfreindre le Code de la route afin de satisfaire vos attentes (valeur interne narcissique). Ici vous pouvez vivre un conflit éthique des valeurs actives entre (externe/interne) surtout si vous provoquez un accident dû à votre choix. Ce questionnement éthique met en balance chez le sujet le choix et un conflit des valeurs. Seuls ceux qui ne se posent pas de question éthique, soit par déresponsabilisation sur une autorité ou soit par profil psychologique comme les pervers et les psychopathes, peuvent collaborer à ces horreurs : tortures, pesticides, lobby des labos, sang contaminé, etc.

 

Éthique : n’est ni la morale, ni une norme, ni une loi, ni une déontologie…

Ainsi, l'éthique n'est pas la morale du bien et du mal. L’éthique est une science. Cette science étudie et traite des principes de valeurs actifs (critères) et repère les instances régulatrices des conduites de nos actions (soi-même ou Institutions). Pour se réguler, tous les acteurs et leurs actions s’appuient sur des référentiels de critères de valeurs actifs dans leur culture en référence aux instances régulatrices (représentant des codes sociaux).

Ces valeurs ont deux faces : une face interne et une face externe au sujet  (réf. 8). La face interne se compose de notre dimension narcissique. La face externe se compose des savoirs adhérés et utilisés comme ce qui fait valeur sous forme de lois, de morale, de normes, de codes, de déontologie… ces derniers sont des fabriqués et des produits sociaux : des poïesis.

L’éthique est ce processus pivot du questionnement : une praxis. Elle contient tous ces référentiels de valeurs et les met en jeu dans l'agir et le penser. En Grèce antique, l'éthique comme processus d’évaluation interroge les savoirs fabriqués et légitimés comme ce qui fait valeur pour orienter leurs actions. À cette époque, quels que soient les courants de pensée, l'éthique était toujours présente afin de développer une pensée critique, dynamique et dialectique. Ici point d’affirmation comme rhétorique des rhéteurs et sophistes. Ici un questionnement sur l’action en relation aux vertus, aux valeurs pratiquées . L’éthique, comme processus ou "praxis", contient tous les fabriqués ou "poïesis", ci-dessous, c’est le processus même de l'agir se référant soit à :

  1. Un dogme d'un “c'est ainsi” du déterminisme et du fatalisme
  2. Une morale d'un “c'est bien ; c'est mal” d’un code de bonnes conduites sociales
  3. Une norme d'un “il faut ; on doit” d’un code de “bonne fabrication” des organisations (bonne note)
  4. Une déontologie d'un “il faut ; on doit” d’une norme de “bonnes conduites" professionnelle des métiers
  5. Des savoirs en perpétuel mouvement

 

Ataraxie : Être soi-même un philosophe accompli dénoterait de notre capacité à nous questionner sur ce qui vaut ou fait valeur afin d’orienter nos actions dans un souci de soi et des autres. Avec l'éthique comme processus d’évaluation, nous façonnons notre quatrième pierre à notre quête de la paix de l’âme.