A - Évaluer serait exister…

 

A1 - L’évaluation, les trois théories majeures

  • L’évaluation en France à mauvaises presses et cela est bien dommageable puisque sans elle nous ne serions même pas qui nous sommes. À chaque instant, ce qui nous permet d’être présent est notre capacité évaluative différentielle. La cause de cette mauvaise presse est due au faîte d’une confusion de langage. Lorsque les contrôles se déguisent en cathédrale évaluative nous craignons le pire (Ardoino & Berger 1989 - 1990). Si évaluer, c’est exister ce qui existerait alors chez-nous, ici même, ce seraient les institutions qui évaluent et non les sujets qui les composent et qui subissent l’évaluation comme contrôle. Pour éclaircir cette confusion, dans cette page nous présentons les trois théories majeures de l’évaluation (inspirées et interprétées d'après les deux ouvrages : Bonniol & Vial 1997 - Vial 2012). En fin d’article vous appréhenderez comment les trois évaluations sont intriquées :
    • L’évaluation du contrôle par la mesure (quantification comme les notes) > Approche comparative à un étalon
    • L’évaluation du contrôle par la gestion (engagement entre parties) > Approche comparative à un contrat
    • L’évaluation située "performative" (capacités à questionner les critères de valeur = processus) > Approche estimative de la situation et du contexte


A2 - L’évaluation du contrôle par la mesure,
        une approche comparative à un étalon

  • Dans ce cas-là nous sommes dans un dispositif d’évaluation qui mesure un écart à un référé comme critères retenus. Que ce référé prenne la forme d’un savoir élevé en une idéologie dogmatique "d’un c’est ainsi…" du déterminisme, d’une idéologie moralisatrice "d’un c’est bien ou c’est mal", et pour clôturer d’une idéologie normative "d’un il faut ou on doit", cela reste toujours une mesure référée à critère étalon “idéal” ou comportemental dans le cas du DSM5 de la psychiatrie : la courbe de Gausse du normal et du pathologique. Vos mœurs et vos résultats se mesurent et se comparent avec des notes sur une échelle objective métrique comme à l’école.


A3 - L’évaluation du contrôle par la gestion,
        une approche comparative à un contrat

  • Dans ce cas-là ce qui fait référence n’est plus une idéologie (Dogme-Morale-Norme). La référence est un contrat, une alliance, un pacte implicite ou explicite. Le contrat fait foi des engagements mutuels entre les signataires. C’est identique au contrat de mariage, au contrat didactique d’apprentissage, à l’Éducation Thérapeutique du Patient (ETP), au contrat à objectif en entreprise, à la relation implicite du médecin et du patient… Nous sommes ici dans les notions de droit et de la déontologie qui stipulent ce qui est interdit ou autorisé. Dans ce cas-là c’est l’écart au contrat qui sera mesuré. Votre engagement se mesure et se compare aux articles en corps 5 du contrat. Lisez les petites lignes… Nos paroles s’envolent quand nos écrits déterminent nos garanties.


A4 - L’évaluation située ou évaluation en acte
        une approche estimative et un questionnement des valeurs

  • Dans ce cas-là nous abandonnons les deux premiers dispositifs d’évaluation du contrôle de la mesure et de la gestion. Nous passons dans un autre univers, celui de l’estimation et de l’interprétation, nulle affirmation n’est possible. Comme nous nous référons ni à un savoir élevé en idéologie (Dogme-Morale-Norme), ni à un contrat d’engagement mutuel comme étalon de comparaison, qu’est-ce donc cette évaluation située "performative" ? C’est la capacité de tout sujet, collectif, organisation à peser le pour et le contre, à distinguer ou à discerner aux travers des signes observables pour choisir et s’orienter dans un contexte et une situation précise. L'évaluation située rend intelligible, elle élabore du sens contrairement aux autres évaluations du contrôle qui mesurent un écart. Nous ne sommes plus ici dans le contrôle de la mesure et de la gestion comparatives externe au sujet, nous sommes ici dans la capacité du sujet, du collectif ou de l'organisation à questionner leurs valeurs, leurs savoir etc. Cette auto-évaluation est un auto-questionnement et un auto-contrôle (Vial 1997). Ceci a pour conséquence l'auto-création et l'auto-organisation des acteurs eux-même. En exemple, ici même dans cet article, il est nécessaire de citer les auteurs et sources sur lesquels notre propre pensée s'appuie pour développer nos idées (système de référence et de valeurs). Notre pensée s'appuie toujours sur des penseurs qui nous ont précédés.


A5 - Match de l’évaluation évaluée

  • Entre rétrospective et prospective, ces trois types d’évaluation n’articulent pas cela de la même façon. Les deux premières évaluations du contrôle par la mesure et de la gestion sont rétrospectives d’un retour à un référé comme norme instituée (idéologie ou contrat). L’évaluation située "performative" est prospective d’une avancée possible par l'estimation des situations qui nous met face à nos propres limites (connaissances relatives). Les deux premières approches rendent compte quand à la dernière, elle permet de rendre intelligible les situations par élaboration du sens. Les deux premières approches permettent la régularisation de la conformation et la dernière permet de s'auto-réguler et ainsi s’orienter, et d'apprendre. Quelle que soit l’évaluation, elle n’est jamais une fin en soi, elle est seulement le moyen pour le social comme pour le sujet de se situer dans un contexte afin de choisir et s’orienter.

 

Notre maxime “Évaluer serait exister” dénote de la présence de l’évaluation située "performative" comme verbe d’action ou processus. Nous ne pouvons pas ne pas évaluer, sinon nous serions des “légumes”. Elle est notre capacité à développer notre puissance d’être comme sujet pensant et agissant. Mais comme nous ne pouvons pas tout savoir, lorsque nous ne savons pas nous allons à la rencontre de ceux qui savent, les professionnels de leur métier, santé, soins, psy, etc, afin de pouvoir de nouveau évaluer pour en fin de compte quoi : choisir, s’orienter et nous réguler.

 
INFO +
L’évaluation à pour caractéristiques… L’évaluation située "performative" est…
  • Moyen : collecter des informations sous forme d’indicateurs en fonction de critères
  • Fonction : construire le sens pour pouvoir choisir
  • Finalité : s’orienter et se réguler pour faire un pas de plus, pour agir
  • Un débat sur le sens des valeurs et des critères convoqués
  • Une estimation pour s’orienter et naviguer
  • Une éthique comme science des principes de valeurs régulateurs des actions.