● Les niveaux de maturité du Moi
Pour Pierre Hadot, dans son ouvrage de la philosophie comme manière de vivre il écrit : “Cela m'amène à préciser ce que l'on peut entendre par niveaux du “moi”. Je distinguerais trois niveaux “plus un” ;
- Conscience sensible du Moi confondu avec le corps (enveloppe ou Moi-peau)
- Conscience rationnelle réflexive (représentation d’un Soi dissocié du corps)
- Conscience spirituelle lucide du monde (intuition d’une totalité le Tout ou altérité intégrée)
- Conscience mystique et cosmique (unification au Un)
il précise ainsi :
les trois niveaux sont, d'abord, celui de la conscience sensible, où le moi se comporte comme s'il se confondait avec le corps ; puis, celui de la conscience rationnelle, où le moi prend conscience de lui-même comme âme et comme réflexion discursive ; et, enfin, le niveau de la conscience spirituelle, dans lequel le moi découvre que finalement il a toujours été, inconsciemment, Esprit ou Intellect, et dépasse ainsi la conscience rationnelle, pour atteindre à une sorte de lucidité spirituelle et intuitive, sans discours et sans réflexion. (…) La philosophie consiste à s'élever du premier niveau au troisième niveau. J'ai dit trois niveaux, plus un, car l'expérience mystique représenterait un niveau tout différent. Dans l'expérience mystique de l'Un, ce vrai moi dépasse son état d'identification avec l'Esprit et parvient à un état d'unité et de simplicité absolues ; il vit en quelque sorte avec l'Esprit l'état d'indétermination et d'infinité… (Hadot P. 2001 p. 140)
● Illustration des niveaux de maturité du Moi
Une autre façon de présenter cette idée, la métaphore de la bicyclette avec dynamo à l’ancienne de Pierre Hadot est illustrative : la lumière s'allume si la bicyclette commence à se mettre en marche et roule dû au frottement de la dynamo sur la roue. Ainsi, nous pouvons dire que l’action de rouler du corps-sensations provoque la lumière comme conscience de soi du 1er niveau puis par réflexivité philosophique du 2e niveau. Reste le 3e niveau de l'intuition qui demande d’ouvrir le champ de la conscience à la totalité du monde resté dans l’obscurité (altérité et inconscient) et pas seulement à l’endroit éclairé comme conscience de Soi (le Moi).
Nous pouvons aussi présenter l’énoncé de Golse Bernard (réf. 6) pour les deux premiers niveaux : “On se sent exister bien avant de se savoir être.” Ici, les sensations du corps élaborent à terme la conscience du sujet par réflexivité. Et pour Cornelius Castoriadis (réf. 7 & 8), notre imaginaire fabriquerait notre identité individuelle (monade psychique comme noyau de nous-même) dû au frottement avec l’imaginaire collectif du contexte culturel où nous nous baignons chaque jour.
Ataraxie : la paix de l’âme du sujet philosophe accompli (et non d’un sophiste ou rhéteur) impliquerait un processus de transformation de notre Moi intégrant l’altérité ou l’autre en nous-même. Voici notre troisième pierre à notre quête de la paix de l’âme.
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