Certains philosophes ont exprimé bien avant la psychanalyse la présence de cet inconscient moteur. Pour ces auteurs, l’inconscient serait un océan d’énergie insondable et les vagues représenteraient et témoigneraient des moments de consciences éphémères de la matière. Mais de quel inconscient parlent-ils : le princeps, le primaire ou le secondaire du refoulé ? (cf. biblio Sanekli, 2016)
B1 - Spinoza parle du “Conatus” comme impulsion primaire
- Le “Conatus” est au corps ce que le “Voluntas” est à la psyché. Le “Conatus” serait ainsi le principe de la vie et de la continuité. Ni cogito et ni libido, le “Conatus” serait pour Spinoza un principe unificateur de la totalité de l’organisme physique en expérience d’être. Le désir résultant n’est pas celui de la psychanalyse comme expression d’un manque d’objet élu par la libido de la pulsion à orientation sexuelle. Le désir de Spinoza serait l’expression de cette puissance d’exister comme volonté de l’organisme de perdurer dans son être : l’effort. Ainsi, ni inconscient latent (PCs), ni inconscient refoulé freudien, l’inconscient chez Spinoza serait l’expression de cette puissance d’être comme phénomène princeps de tous corps vivants.
B2 - Schopenhauer soutient que le monde n’est qu’une représentation
- Le monde n’est autre que notre représentation de notre vouloir. Ce vouloir est représentation et toutes représentations sont un vouloir. Ce vouloir n’est pas la volonté consciente du sujet, mais un vouloir comme vitalité inconsciente. Pour Schopenhauer, cet inconscient est une puissance agissante comme dynamique interne du corps et du vivant. Tout comme chez Spinoza, l’inconscient dont parle Schopenhauer semble être l’inconscient princeps agissant le corps. L’inconscient personnel latent et refoulé du sujet est pour ces deux auteurs l’effet résultant d’un corps ignorant la raison moïque psychique. Dépassant le Moi, cela s’exprime soit comme puissance du vivant exprimée par son désir d’être pour Spinoza ou soit comme volonté d’être exprimée par sa représentation pour Schopenhauer.
B3 - Nietzsche décrit l’inconscient comme une donnée biologique et physiologique
- Il ne le considère pas comme l’inconscient refoulé freudien des représentations inavouables de nos pulsions. Ici nous rejoignons les approches de Spinoza et de Schopenhauer. Cet auteur développe les idées de volonté de puissance du corps étant, de domination pour survivre, de l’oubli pour actualiser les savoirs et de la promesse. La promesse serait l’expression des pathologies de la mémoire par phénomène d’adhérence aux représentations. S’étayant sur les textes de Nietzsche, Ricœur parle de trois types de traces activant la mémoire : les traces mnésiques comme données du couple (affects/représentations), les traces mnémoniques qui stimulent la mémoire et les traces écrites historiographiques. La mémoire figée ou la mémoire en boucle serait ainsi l’origine de toutes pathologies.
- À son inverse, la capacité d’oubli serait le signe de bonne santé mentale. Cette capacité d’oubli laisse libre écoulement à la psyché et à son inconscient princeps exprimant la volonté de puissance du sur-homme libéré des entraves de la culture et de ses valeurs fabriquées. Pour cela, Nietzsche ne décrit pas la notion de temps psychique d’une façon développementales et psycho génétiques portées par un modèle de pensée linéaire et incrémental du temps (culture sémite). Nietzsche décrit la notion de temps par une pensée cyclique et itératif (culture indo-européenne). Dominer le temps et sans extraire consisterait à vivre un éternel présent ou la capacité d’oublie serait l’expression de la présence active de cette puissance d’être de Spinoza ou volonté de puissance de Schopenhauer. La réactualisation des savoirs par intégration et assimilation du nouveau serait cet accroissement de la puissance d’agir et de penser. S’extraire de l’aliénation du temps psychique moique, serait allé au-delà des limites de la mémoire et de sa permanence induisant la capacité à créer et de se créer en retour.
- L’inconscient de Nietzsche serait un processus universel, celui du changement permanent, et pour l’homme apprendre à tout âge et en tous lieux. Nous sommes très proches des concepts de WR Bion ci-après cité avec son processus “C” de la connaissance.
B4 - Sartre et le courant de pensée existentialiste ont exprimé que l’existence précède l’essence
- Autrement dit, agir et penser comme verbes d’action élabore le sujet et l’identité de l’être substantivé comme permanence. Ainsi de même que Spinoza, Schopenhauer et Nietzsche, ce qui est princeps serait l’expérience d’être en support du corps vivant. Ce corps serait habité par la volonté de puissance exprimée par le désir non pas dans une relation d’objet comme dans la psychanalyse, mais par une relation de milieu où le désir serait le signe de l’expérience même de cette volonté puissance d’être des corps vivant.
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