A - Visée de la psychanalyse

 

  • La psychanalyse à une visée politique et philosophique : contrer la barbarie du psychisme et développer l’humanitude des hommes et de la cité. Freud qui était athée, utilisait la science comme base méthodologique de son travail, mais il avait une quête bien plus grande que le soin, celle de comprendre ce qui enclavait l’âme humaine (Bettelheim, B. 1984 - Freud et l’âme humaine*).
      

  • S’il y a une science, c’est celle du fonctionnement de la psyché : science de l'âme humaine. Le mot psychanalyse forgé par Freud exprime les deux termes ensemble avec Psyché > Âme et Analyse > Science. Autrement dit, sa quête était de chercher comment nous pouvions vivre ensemble sans s’entre tuer ou s’auto flageller par culpabilité excessive, deux formes prises par la barbarie psychique.
     

  • Ainsi poser, l’idée soutenue par Freud n’est pas directement le soin des symptômes. S’il y a un mieux-être à la fin d’une analyse, cela sera la conséquence d’un autre processus. Celui de la maturation de la psyché (âme) du sujet en le libérant de ses angoisses primo infantiles et de ses désirs refoulés qui l'aliènent. “Le succès thérapeutique n’est pas ce à quoi nous aspirons en premier lieu (bénéfice secondaire) ; ce que nous voulons en revanche, c’est mettre le patient en état d’appréhender consciemment ses motions de souhait inconscient […] le complexe inconscient […]” (Freud S. (1909). Cinq psychanalyses. Édition 2008. PUF p. 258).
     

  • La psychanalyse analytique de Freud n’est ni de la thérapie, ni de la psychologie. La psychanalyse au sens premier de Freud est un processus d’accompagnement de la maturation de la psyché (âme) des hommes, dans une visée humaniste afin de les libérer de leur prison psychique. La psychanalyse s’inscrit ainsi dans le courant de la relation éducatif au sens, non pas de l’apprentissage instrumental ou opérationnel d’un savoir donné (information & savoir) , mais d'un accompagnement épistémologique d'une connaissance élaborée. C’est un accompagnement du désir de savoir de la pulsion épistémophilique de l’analysant via son inconscient qui parle de ses manques et de ses désirs refoulés. Seul, sans accompagnement, l’analysant risque fort de se perdre dans les ruses et les méandres de son propre esprit qui s’auto justifie.
      

  • Dans le cas contraire, c’est-à-dire la non-évolution psychique, les hommes et leurs construits sociaux sont les reflets qui témoignent de leur propre monde intérieur. Regardez autour de vous. Ces témoignages pointent la stagnation et la régression aux stades antérieures primitifs du développement de la psyché ou âme. Cette stagnation et régression au stade antérieures (souvent sadique-anal) sont visibles par les indicateurs du désir de possession, de maîtrise totale et du besoin de tout contrôler non pas soi-même mais son environnement et le devenir. Ces indicateurs signe l'apogé du complexe d'Œdipe. Les angoisses concomitantes de la mort et de la solitude de la pulsion tonique de Thanatos prend le pas sur la pulsion tonique d'Eros des angoisses d'absence de sens et de liberté-responsabilité (Irvin-d Yalom). Formulé autrement, l’homme enchaîné désire toujours détenir le pouvoir (Phallus) et se croire ainsi omnipotent (le Créateur).
     
  • Actuellement apparaît le complexe d’Iznogoud, grand vizir : “Je veux être Calife à la place du Calife” comme phrase emblématique qu'il répète inlassablement. Qui n’a jamais rêvé de prendre la place de l'autre lève la main ? Attention à vous, votre conscience vous ment, même au Ve siècle av. JC les paroles de Jocaste à Œdipe le formule (Sophocle Œdipe-roi), ce très grand désir inconscient de prendre la place de l'autre dans la couche : “Ne redoute pas l’hymen d’une mère : bien des mortels ont déjà dans leur rêve partager le lit maternel. Celui qui attache le moins d’importance à pareille chose est aussi celui qui supporte le plus aisément la vie.1”  En termes Psy, le complexe d'Iznogoud fait le déni du Moi et de sa place de grand Vizir. Il a pour désir que son idéal du Moi se substitue au Surmoi en place du Calife son chef. Ainsi, Iznogoud pourra libérer sa toute-puissance du Moi idéal omnipotent. Ce "complexe d'Iznogoud", cumulant celui de Narcisse & Œdipe, est révélateur de certaines pathologies. Hier c’était la paranoïa, l'hystérie, la perversité… Aujourd’hui, ce sont surtout des pathologies limites qui prennent le pas (Misès*), nous fabriquons des imposteurs de la sur-adaptation aux limites et des fanatiques de la sur-exclusion des limites. Ces dernières sont explicitées ci-dessous à la fin de ce déroulé sur la psychanalyse, où le couple incarné (Moi & Surmoi) est disqualifié au bénéfice du couple phantasmatique (Moi idéal & idéal du Moi) : “is no good”.

     

1 - Vidal-Naquet, P. (1973). Tragédie de Sophocle (1962). Gallimard, p. 217