Le bonheur manqué et le bonheur en acte d'un amour qui peux s'exprimer par deux désirs opposés et très différents. La Vie se composerait de deux items ( Naissance / Mort de ce qui est né ) (cf. Rilke). Pour que la Vie vive, son processus serait l’Amour se composant elle-même de deux items ( Compassion / Haine ). Pour les philosophes et les psys, cet amour s’exprimerait soit par le désir (d) fondé sur un manque (bonheur manqué) ou soit par le Désir (D) fondé sur la puissance (bonheur en acte). L’un de ces désirs est aliénant (pulsion de mort) lorsque l’autre est libérant (pulsion de vie). Parler d’amour est une chose, mais le vivre sans en parler en est une autre. Que pouvons nous croire et dire de ces deux Amour-Désir et amour-désir ? Déroulons la pelote…
A - Le bonheur manqué : l’amour de Platon
- Cet amour-là est celui de la psychanalyse, comme de tous ceux qui pensent que l’amour est un manque d’objet de jouissance. Platon rapporte vers 400 av. J.-C., que lors du célèbre banquet réunissant des philosophes ceux-ci ont débattu sur la nature et les qualités de l’amour : “Qu’est-ce l’amour ?”. Socrate aurait répondu que l’amour est désir et complété par le fait que le désir est manque. Nous avons ici un double mouvement :
- amour > désir
- désir > manque
- Puis, Schopenhauer au XIXe siècle aurait complété cette égalité par le faîte que le manque est souffrance et qu’une fois la souffrance et le manque comblé se serait l’ennuie qui nous attendrait. Ce qui nous donne ce cheminement (sans capital du sens commun) :
- amour > désir
- désir > manque
- manque > souffrance
- absence de manque > ennuie
- ennuie > quête d’un autre objet du désir
- Nous pouvons prendre l’exemple de l’amant en manque de l’aimé, du chômeur en manque de travail, de l’élève en manque de liberté, de l’individu en manque du dernier smartphone à la mode… le manque de l’autre comme objet provoquerait le désir de celui-ci, puis une fois comblé de sa présence, l’ennui, la lassitude, la tristesse, le déplaisir, le spleen, le désœuvrement, l’abattement, le plaisir à rien du dépressif et du mélancolique… en bref, le non-désir adviendrait petit à petit. Combler notre manque et le désir s’envolerait. Nous serions, ici, dans une approche de la relation d’objet - le sein nourricier de la mère manquant - et une temporisation du passé de la nostalgique projeté sur le futur par l’espérance. L’avoir l’emporterait sur l’être et le bonheur serait manqué si l'objet élu n'est pas là.
B - Le bonheur en acte : l’amour de Spinoza
- Cet amour-là est celui du sacré repris dans toutes les spiritualisés et par les philosophes comme Spinoza et plus près de nous Misrahi, Ferry, Comte-Sponville. Ici, l’amour est aussi un désir mais ce désir n’est pas fondé sur le manque de l’objet de jouissance. Puisque nous sommes des êtres de la relation et que nous sommes le résultat de nos relations, ce désir serait un reflet, celui de la puissance d’être que nous renvoie l’autre comme un miroir, comme dans la relation ( enfant / mère ). L’autre est là pour nous permettre de développer cette puissance interne de l’être, ce désir serait une autorisation à être. Ce qui nous donne ce cheminement (avec capital du sens sacré) :
- Amour > Désir
- Désir > Puissance d’être
- Puissance d’être > Plaisir = jouir et se réjouir
- Plaisir > Joie
- Absence de Joie > Absence de Désir et de Vie
- Absence de désir > Quête de l’Amour
- Nous pouvons prendre l’exemple du vieux couple heureux, de l’entreprise où il fait bon de travailler, de l’élève où sa curiosité de connaître et de comprendre est en œuvre. Jamais en manque d’un objet de jouissance, ils se suffisent de ce qu’ils ont, tout en restant toujours ouvert et curieux à ce qu’ils pourraient faire autrement. Nous serions, ici, dans une approche de la relation de milieu - le sein nourricier de la mère devient symboliquement autre comme la connaissance - et la présence à l’instant et à l’autre (plaisir = jouir et se réjouir) l’emporterait sur la temporisation du passé de la nostalgique projeté sur le futur par l’espérance ci dessus. Ce qui fait dire à André Comte-Sponville que la désespérance est la clé d’un Amour durable. L’être l’emporterait sur l’avoir et le bonheur serait en acte, dans notre puissance d'être.
C - Psy & Rapport au temps
- Psy : Idéalisation ou Sublimation
- Dans ces deux options, l’Amour (A) serait le processus soutenant le phénomène nommé Vie (V). Le désir en serait sa résultante, mais l’orientation du désir changerait suivant si cet amour est un désir platoniciste (d) ou un Désir spinoziste (D). La nuance entre les deux cheminements serait la capacité du sujet à sublimer cette métaphore de Mélanie Klein du “sein nourricier de la mère” en autre chose. L’absence de cette capacité à sublimer par symbolisation ce faîte impliquerait que nous aurions toujours besoin de celui-ci sous des formes transposées idéalisées par des objets de compensation : une beauté plastique et non d’âme, des dépendances addictives, etc. Cet amour-là serait une faim sans fin, toujours à renouveler pour les sujets et conditionnerait le comportement idéal dans une société d'hyper-consommation.
- Dans ces deux options, l’Amour (A) serait le processus soutenant le phénomène nommé Vie (V). Le désir en serait sa résultante, mais l’orientation du désir changerait suivant si cet amour est un désir platoniciste (d) ou un Désir spinoziste (D). La nuance entre les deux cheminements serait la capacité du sujet à sublimer cette métaphore de Mélanie Klein du “sein nourricier de la mère” en autre chose. L’absence de cette capacité à sublimer par symbolisation ce faîte impliquerait que nous aurions toujours besoin de celui-ci sous des formes transposées idéalisées par des objets de compensation : une beauté plastique et non d’âme, des dépendances addictives, etc. Cet amour-là serait une faim sans fin, toujours à renouveler pour les sujets et conditionnerait le comportement idéal dans une société d'hyper-consommation.
- Temps présent [ Passé / Futur ]
- Dans l’amour platoniciste, si nous sommes comblés comme ces enfants surprotégés des familles “cotons”, l’instant présent ne peut plus apporter de plaisir puisque les manques sont comblés. Ces enfants, comme ils sont trop plein de tous et d’eux-mêmes, seul l’ennuie de Schopenhauer serait le résultat et la conséquence invoquant la nostalgie d’un passé projeté par l’espérance sur un futur hypothétique et idéalisé : les illusions perdues. Par contre la proposition s’inverse dans l’Amour spinoziste. C’est le plaisir tiré de l’action sans nostalgie et sans espérance dans l’instant présent qui l’emporte sur le passé et le futur. Plaisir à partager ensemble, plaisir de la présence de l’autre… plaisir et appétit seraient pour cette Amour-là une faim assouvie.
D - Thérapie [ Souffrance / Bonheur ]
En thérapie, cette orientation du désir est une des clés des problématiques en jeu. Comme la Vie est un mouvement perpétuel où tout change, où jamais rien ne reste à l’identique, alors la conséquence serait la présence du processus du deuil et de dépendance concomitant (DCTA : Déni - Colère - Tristesse - Assomption d’assumer). La souffrance des sujets serait due à leur cristallisation sous forme de nostalgies du passé et d’espérances impossibles sur le futur. Dans ce cas, la souffrance induite serait visible par un immobilisme dépressif ou mélancolique. La remise en mouvement du sujet et l’éloignement de sa souffrance seraient un déplacement. Il semblerait nécessaire de muter cet amour & désir platoniciste fondés sur le manque (à Être) d'un bonheur manqué, par cet Amour et Désir spinoziste fondés sur la puissance (d’être de l'Être) d'un bonheur en acte.
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- D’après les ouvrages :
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André Conte-Sponville (2000) Le bonheur désespérément. Edition Plein feux
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Ferry, L., & Capelier, C. (2015). La plus belle histoire de la philosophie. Points.
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Misrahi, R. (2014). La joie d’Amour. Pour une érotique du bonheur : J’ai lu - essai.
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Misrahi, R. (1996). La jouissance d’être : le sujet et son désir : encre marine.
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Misrahi, R. (1994). Le bonheur : essai sur la joie (Vol. 80) : Hatier.
- Rilke, R. M., & Regnaut, M. (1904). La princesse blanche. (Edit. 1987) Actes Sud - Théâtre de la ville.
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Spinoza, B. (1978). Œuvres complètes [1954]. Gallimard, La Pléiade.
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