L’Amour sous-tend une énergie et des sujets : le Désir-sujet. Pour le comprendre, nous avons le sens ancien de la philosophie de Spinoza et le sens contemporain de la psychanalyse de Lacan. Ainsi, la notion de désir prend deux directions opposées : la dialectique du désir. Nous avons soit le désir fondé sur un regret (manque) ou soit le désir fondé sur un souhait (projet). Quand l’un nous tire vers l’arrière, le passé de nos souvenirs d’Être, notre histoire, l’autre nous propulse vers l’avant, vers le futur de nos aspirations d’être, notre devenir. L’Amour et son Désir est-il l’un, est-il l’autre ou les deux ?
D1 - Désir-regret = manque
- Ce désir tourné vers le passé est nostalgique. Il est fondé sur un manque, un trou, un vide d’une expérience vécu et de l’autre. Pour la psychanalyse de Lacan, le processus serait le faîte d’avoir vécu une expérience puis d’avoir la nostalgie de la jouissance élaboré par l’objet ou le sujet de cette expérience. Comme l’enfant désir l’exclusivité du désir de la mère (idem contrat de mariage) et que cela est impossible (père, fratrie, etc.), le petit d’homme sera toujours en manque : “le manque à être”. Qui n’a jamais vécu l’attente de l’aimée lève le doigt ?
D2 - Désir-souhait = accomplissement
- Ce désir tourné de l'instant vers le futur comme devenir est une aspiration à être. Pour la philosophie de Spinoza se pose la question : Mais qu’est-ce que ce désir désire ?
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“Il poursuit la complétude. Il n’est pas comme on le croit trop souvent aujourd’hui (Schopenhauer, Freud, Sartre, Lacan), un manque indépassable, un manque à être qui serait, comme tel, la source de notre insatisfaction permanente, de notre angoisse et de notre malheur. Bien au contraire, le désir est le mouvement dynamique du manque qui se dirige vers sa propre suppression comme manque et donc vers son propre accomplissement comme plaisir et comme joie. Ce n’est pas le vide qui est la source de l’action, c’est l’anticipation de l’accès à la plénitude.” (Misrahi R. 2014 p. 32).
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D3 - Ni tout désir-regret & Ni tout désir-souhait
- Le désir-regret élabore notre mémoire, nos souvenirs : “le manque de l’autre en soi”. Il permet à notre propre conscience réflexive de se déployer. Le désir-regret est fondateur du sujet. Il lui rappelle qui il est : “plus de la même chose”. Rester uniquement dans cette forme du désir-regret est aliénant et sclérosant. Dans ce cas nous ne pouvons pas faire le deuil des événements passés et nous refusons toutes formes de changement porté par la vie elle-même qui nous a créés.
- Le désir-souhait élabore notre présence, le bonheur et la joie de notre puissance d'être. Il permet à notre conscience dynamique non plus de se remémorer à elle-même, mais de changer, d’apprendre, d’aller vers un ailleurs. Mais attention, si vous survalorisez ce type de désir-souhait au détriment du premier, il se peut que cela soit une fuite du Moi du sujet en mal d’être de l’Être.
- À découvrir à ce propos le livre :
- André Conte-Sponville (2000) Le bonheur désespérément. Edition Plein feux
- Transcription d'une conférence-débat le 18 octobre 1999 des Lundis Philo
D5 - Carte heuristique ou mental du désir
D5 - Approche critique des deux points de vue
- Vous pouvez constater que ni le désir-regret de la psychanalyse de Lacan et ni le désir-souhait de la philosophie de Spinoza prime. Les deux sont liés, sont nécessaires et sont indispensables pour que le sujet d’une part soit témoin de sa propre réalité de l’Être et d’autre part puisse goûter la vie et vivre “la jouissance d’être” de Misrahi (1996). Suivant les auteurs le désir princeps ou premier est soit l'un ou soit l'autre, entre celui de la philosophie ou celui de la psychanalyse. À notre compréhension, nous postulons que le désir est ce jeu subtile articulant dynamiquement les deux pôles temporels : remémoration / projection. Nous pourrions nommer cet intervalle : l'espace psychique du sujet.
Le travail en thérapie ou en coaching est justement de déverrouiller ce qui bloque cette alternance ou oscillation des désirs chez le consulté.
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