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Happycratie : comment l’industrie du bonheur a pris le contrôle de nos vies

TitreHappycratie : comment l’industrie du bonheur a pris le contrôle de nos vies
Publication TypeBook
Année2018
AuthorsIllouz, E, Cabanas, E, Joly, F
PublisherPremier Parallèle
Mots-clésBonheur, happicondriaque, happycratie, heureux, Travail
URLhttps://www.youtube.com/watch?time_continue=95&v=MMMBlWzAJAw
Full Text

"Le bonheur et le malheur serait en vérité une affaire de choix. […] On a toujours cru profondément […] qu’un sort misérable est toujours la conséquence d’efforts insuffisants. Le Self-Made-Man par excellence.” (Illouz E. 2018, p.11). En cas d’échecs personnels de notre capacité à nous façonner nous-même dans la poursuite effrénée du bonheur dans un comportement happycondriaque, le sentiment de solitude, le détachement d’autrui, le désespoir, la dépression et le suicide en sont leurs corollaires par autodénigrement : “je suis incapable… J’ai honte… Je ne maîtrise pas ma vie émotionnelle… J’ai commis une faute… Je me condamne… Etc.” Ainsi, le contexte qu'il soit familial, institutionnel ou de l'entreprises privée, se dédouanerait de leurs responsabilités en accusant l'incapacité des sujets à être heureux. Ce qui fait dire à Illouz à propos de cette illusion de la quête du bonheur individuel : “de nombreux auteurs, suivant en cela Michel Foucault, critiquent de façon convaincante ses prétentions, en arguant principalement que s’en remettre au gouvernement de soi – fondée sur l’idée que les gens pourraient maîtriser leur existence à volonté – pousse l’individu à se croire responsable de tout ce qui lui arrive.” (Illouz E. 2018, p.156)

 

  • “Forcé est d’admettre que la notion de bonheur joue désormais un rôle fondamental dans la compréhension que nous nous faisons de nous-mêmes et du monde. Elle est devenue si familière qu’elle est considérée comme parfaitement acquise, si naturelle qu’elle en a perdu toute espèce d’étrangeté ; il y aurait même quelques excentricités, quelque audace véritable à oser la remettre en question.” (Illouz E. 2018, p.9)
     
  • “Le bonheur… Il est désormais envisagé comme un ensemble d’états psychologiques susceptibles d’être instauré et commandé par la volonté ; le résultat de la maîtrise de notre force intérieure et de notre vrai moi ; le seul but qui vaille la peine d’être poursuivi ; le critère à l’aune duquel il nous faudrait désormais mesurer la valeur de notre vie, nos réussites et nos échecs, et le degré de notre épanouissement psychique et émotionnel.” (Illouz E. 2018, p.10)
     
  • “Le bonheur, ici, désigne moins une notion qu’un genre bien particulier de personnes : une personne individualiste, fidèle à elle-même, résilier en te, faisant preuve d’initiative, optimiste et doué d’une intelligence émotionnelle.” (Illouz E. 2018, p.10)
     
  • “Le bonheur et le malheur serait en vérité une affaire de choix. […] On a toujours cru profondément […] qu’un sort misérable est toujours la conséquence d’efforts insuffisants. Le Self-Made-Man par excellence.” (Illouz E. 2018, p.11)
     
  • “Entre souffrance et bien-être, […] la science du bonheur affirme avec insistance que souffrance et bonheur son affaire de choix personnel. […] La science du bonheur nous impose d’être heureux mais elle nous impute notre incapacité à mener des vies plus réussies et accomplies.” (Illouz E. 2018, p.19)
     
  • “En premier lieu, le bonheur est devenu un enjeu vital pour les entreprises et les politiques qui veulent non seulement comprendre ce que ressentent les citoyens, la manière dont ils évaluent certains aspects de leur vie et de celle des autres, mais aussi influer sur ces sentiments, ces réactions et ces manières d’évaluer ; en second lieu, le bonheur est devenu un critère quantitatif permettant de mesurer le bien-être général d’une population, un critère jugé de premier ordre, qui inspire et influence désormais les politiques publiques, les politiques économiques et les processus de prise de décision en général, dans la sphère publique comme dans la sphère privée.” (Illouz E. 2018, p.61)
     
  • “La mesure du bonheur n’est pas seulement essentielle pour le vendre en tant que concept objectif et précis, susceptible d’être étudié avec toute la rigueur scientifique requise ; elle permet également d’en faire une marchandise dont la valeur est la légitimité dépende au plus haut point de la quantification de son efficacité.” (Illouz E. 2018, p.62)
     
  • “Le bonheur, envisagé comme unité de rendement pouvait ainsi être directement relié au comportement consumériste, quel que soit le pays, il se, de très diverses manières. Procéder ainsi permettait de lui donner une valeur monétaire.” (Illouz E. 2018, p.63)
     
  • “Les économise du bonheur se montraient formels : les preuves étaient suffisamment solide pour que les pays puissent être comparés de façon tout à fait impartiale en fonction de leur niveau de bonheur, et les nations et les institutions pouvaient adopter ce critère en toute sérénité, en faire un thermomètre affectif d’une parfaite neutralité pour mesurer l’utilité économique, évaluer le progrès social et guider les politiques publiques.” (Illouz E. 2018, p.64)
     
  • “Si le bonheur est devenu capital dans nos sociétés néolibérales, c’est notamment, nous semble-t-il, parce qu’il est inextricablement associé aux valeurs individualistes – valeur à l’aune desquelles le moi individuel est envisagé comme une sorte d’instance suprême, et les groupes et société comme des agrégats de volonté autonome et séparée. Plus précisément, c’est aussi, suggérant, parce qu’il a démontré sa très grande utilité. C’est que ce concept aide à ranimer, à légitimer et a réinstitutionnaliser l’individualisme, et seul, au moyen d’un discours se voulant scientifique, donc neutre, dépourvu de connotations idéologiques et faisant autorité.” (Illouz E. 2018, p.78)
     
  • “Sur le plan conceptuel, les chantres de la psychologie positive associent fortement, nous l’avons dit, bonheur et individualisme, faisant de l’individualisme une condition culturelle éthique préalable du bonheur, et du bonheur la justification scientifique de l’individualisme, présentée par eux comme une valeur moralement tautologique.” (Illouz E. 2018, p.80)

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